Du vide pour attirer le plein

Vide de sens, c’est ainsi que nous est apparu le Laos au dĂ©but. Il faut dire que l’histoire a plutĂ´t mal commencĂ©e au poste-frontière ou le garde rackette systĂ©matiquement les nombreux touristes qui passent par lĂ … `just to fuc.ing you` qu’il nous dit devant notre refus de payer…

Les quelques kilomètres qui suivent nous projettent dans un autre monde après le Cambodge : ou sont passĂ©s les gens qui sourient si facilement ? On croise des laotiens qui baissent les yeux quand on arrive, pas envie de rĂ©pondre Ă  nos saluts. Heureusement que les plus jeunes nous font toujours des coucous accompagnes de l’habituel `Sabadie !`… Mais bon, on les comprend aussi, des cyclos ils en voient passer des tas tous les jours, par ici.

Côté parcours, c’est la continuité du Cambodge au tout début : nous longeons le Mékong sur des pistes terreuses, fleuve large et majestueux, d’un beau bleu sous le soleil. Borde de sable blanc ou de cultures maraichères, barques de pêcheurs qui chantent en relevant leurs filets, buffles les pieds dans l’eau au soleil levant. Micro en main, les yeux perdus dans le vert des rizières, baffles puissantes sur le côté, un laotien se fait son karaoké en solitaire des 9H00 du matin.

Quand notre route quitte le Mékong, c’est de nouveau le vide : faible densité de population, champs non-cultives par manque d’irrigation possible, paysages tristes et monotones, il n’y a qu’à rouler et `manger` les kilomètres. Finalement l’ennui a raison de nous et  nous grattons du terrain en bus sur 400 km jusqu’à Vientiane.

Les montagnes sont a l’horizon, l’histoire va enfin pouvoir commencer !

Au petit matin, les villages sont noyés dans la brume. Maisons de paille et tressées de bambou. Odeurs de feux de bois, les montagnards se retrouvent en petits groupes autour d’une marmite de soupe. Les femmes se parent de jupes de soie brodées aux mollets pour aller aux champs, des sacs fabriques en toile de sacs de riz sangles sur le front.

Après quatre jours de vĂ©lo a grimper les montagnes (ce qui n’est pourtant qu’un amuse-bouche vu ce qui nous attend les semaines Ă  venir !), Luang Prabang nous apparait comme un petit paradis. Ambiance paisible, petites terrasses avec jardins fleuris au bord du MĂ©kong retrouvĂ©, des dizaines de temples bouddhistes, plus ou moins vieux, avec des centaines de moines aux robes safran qui colorent la ville, et … et… la profusion de nourritures cĂ©lestes : pâtisseries françaises, viennoiseries, baguettes de `comme chez nous`… On n’a rien laissĂ© passer !

Tous les jours, au petit matin, la tradition veut que les moines dĂ©filent dans la ville et se fassent offrir de la nourriture par des gens postes sur les trottoirs. Spectacle magique et colorĂ©… sauf que cela attire beaucoup trop de touristes et enlève le cotĂ© paisible et spirituel de la cĂ©rĂ©monie. Certains d’entre eux braquent leur appareil photo a 50 cm des moines ou d’autres achètent de la nourriture aux locaux puis s’installent sur les trottoirs pour l’offrir aux moines tout en se faisant photographier… Et devinez qui sont ces touristes pour la plupart ?!! Des chinois !! (Non, non, on ne leur en veut pas du tout !). Alors cette vieille tradition est tout simplement menacĂ©e d’être supprimĂ©e… Quand le touriste ne se contrĂ´le plus…

Toujours plus au nord, les virages continuent et nous mènent dans des contrĂ©es plus Ă©loignĂ©es, aux confins de la Birmanie et de la Chine. Muang Sing. Territoire peuple de nombreux groupes ethniques; il y a les Akhas, les Hmongs, les Lolos, les Yaos… Les femmes se distinguent par des coiffes, des bijoux et des habits diffĂ©rents. Au marche du matin, elles viennent a pied depuis leur village dans la montagne, chargĂ©es de leurs produits a vendre sur le dos. DĂ©lestĂ©es, elles repartent vers 9H00 après s’être enfile quelques gorgĂ©es de lao-lao, l’alcool fort du pays. Fascinant, c’est notre coup de cĹ“ur au Laos !

On serait bien restĂ©s plus longtemps, mais il faut penser Ă  s’arracher : notre visa se termine. Encore quelques coups de pĂ©dales dans les montagnes, direction le nord-ouest du pays : une piste pentue et peu frĂ©quentĂ©e mène au Vietnam, Ă  Dien Bien Phu…

la chinoiserie du mois dernier

- 8 decembre 2010 : on va a l ambassade de Chine a Dhakka (au Bangladesh) pour demander un visa de tourisme pour la Chine. Ils refusent.
- En colere et tres decus, on passe des heures sur internet a consulter les forums de voyageurs : l information est recurrente, il est quasi-impossible pour les francais (et seulement pour les francais) d obtenir un visa pour la Chine en Asie du Sud-Est, que ce soit au Cambodge, au Laos ou ailleurs. Un probleme avec notre president ????
- Comment on fait ??? On prend un vol, on zappe la Chine ?? C est quand meme 3 mois de notre voyage, un gros morceau, et malgre tout on a tres envie d y aller !!!
- Idee : les parents de Caro viennent a Noel au Cambodge !
- Ils retourneront donc en France avec nos passeports et les posteront a l ambassade de Chine a Paris.
-17 janvier 2011 : Retour des passeports par DHL a Phnom Penh.
- Simple comme bonjour, n est-ce pas ?!!

Cout par personne : 65 euros de visa + 35 euros pour le faire en 48 heures.
Sauf qu au 1er janvier ces pirates de Chinois ont augmente les prix : de 65 a 95 euros pour le visa et de 35 a 96 euros pour le faire en accelere…
Plus les 96 euros pour le retour par DHL….
Hop, hop, hop, l addition est lourde, pour 2 personnes, ca nous mene a 478 euros… glurps… On a interet a les rentabiliser, nos 90 jours de visa la-bas !!!

o temps, suspends ton vol !

Fermez les yeux cinq minutes, imaginez la mer toute bleue qui brille, bordee de sable blanc et d une frange de cocotiers. Les premieres sensations sont delicieuses, surtout quand ca faisait des semaines qu on en revait ! Quand les pauses-bananes se transforment en baignade ou qu une plage est suffisamment deserte pour planter le bivouac, c est le bonheur assure ! Ajoutez a cela les reveillons de Noel ou du 31/12, les pieds dans le sable, a deguster cocktails, crevettes ou crabes cuisines au poivre vert dans une sauce a l huitre… C est qu on oublie vite qu on voyage a velo ! Parenthese hors du temps pour deux semaines au bord de l eau.
Et pourtant, a Sianoukville, difficile de se laisser completement aller sur nos transats quand on est regulierement abordes par des estropies a qui il manque les deux mains, un bras ou encore les deux jambes. Quand l histoire du Cambodge nous rattrape, notre regard se perd dans les vagues pour quelques instants. Deboussoles, impuissants, nous devenons vite honteux d etre si bien installes quand ces mendiants plantent leur regard dans le notre avec un grand sourire desarconnant. De nombreux villages de pecheurs succedent aux hotels luxueux du bord de mer. Les femmes reparent des filets de peche, des cabas qui debordent de poissons sont transportes sur de petites motos, des milliers de crevettes sont mises a secher sur le bord de la route. Deux mondes qui s entrechoquent au bord de l ocean indien.

Ce mois au Cambodge est particulierement charge en retrouvailles et nous posons les velos dans un coin pour trois semaines pour en profiter. A la mi-parcours de notre voyage, c est avec beaucoup de joie et d emotion que nous retrouvons amis et famille, de quoi bien recharger les accus pour la suite !

Dans son livre Le Papillon de Siam, Maxence Fermine nous avait fait rever de la decouverte des temples d Angkor dans les annees 1860. Cette cite riche et majestueuse etait alors noyee sous une vegetation luxuriante, les racines des arbres envahissant pierres, sculptures et fondations des batiments… `Tant de tresors que la nature a derobes aux regards des hommes pendant de nombreux siecles…. Une ville a la fois minerale et vegetale…Cite de silence et de mystere`. Il reste encore aujourd hui quelques temples a la beaute decuplee par l enchevetrement de racines autour de leurs portes, l encadrement des fenetres ou dans de nombreux recoins.
Notre imaginaire divague dans le lointain. On se prend a rever qu on aurait pu naitre un siecle plus tot et explorer alors un monde ou tout restait a decouvrir, ou le mot `uniformisation` aurait ete incongru. Allez… non, les chinois n ont pas encore construit des autoroutes partout (mais c est pour bientot !); oui, il reste encore des hommes et des femmes qui portent de fabuleuses tenues traditionnelles dans la vie de tous les jours (il faut bien chercher, mais je peux vous donner leur numero de telephone portable…); oui, le Cambodge fourmille de moines bouddhites aux robes orange flashy et qui se protegent du soleil sous des parapluies assortis. Ils font le tour des maisons tous les matins et attendent que les gens leur offrent nourriture, boisson ou argent avant de les benir. Leur echange est tres rapide, froid sans un regard ni un sourire. Nous sommes a chaque fois stupefaits et ahuris devant le spectacle, mais comme chacun le sait, les voies du Seigneur sont impenetrables !

Le temps passe vite quand on est en bonne compagnie, mais c est quand meme avec beaucoup d enthousiasme et d envie que nous reprenons les velos pour quelques tours dans la campagne du pays. C est calme, paisible et bien cool ! Les cambodgiens sont adorables et leurs sourires irresistibles. Les enfants rameutent tout le quartier en nous criant de joyeux `hello !`.
Quelques images reviennent regulierement : des maisons sur pilotis sous lesquelles des hamacs se balancent a longueur de journee; des cochons et porcelets qui sont transportes dans des nacelles en osier sur les porte-bagages des mobylettes; des parties de petanque qui se jouent a l ombre des manguiers ou des tamarindiers; des baguettes et vins rouges francais qui se vendent aux memes rayons que les yaourts au mais ou les fruits du dragon; des fournees de paysans aux chapeaux pointus transportes dans la remorque tiree par une petite moto; des bouquets de dizaines de poules ou canards vivants accroches par les pattes, la tete en bas et toujours transportes sur les petites motos; deux cyclos equippes de boules quies et qui essayent en vain de trouver le sommeil sous la tente : la campagne regorge de maisons qui crachent fort une musique pop-rock jusque tard dans la nuit (La premiere fois, on a cru qu il y avait un anniversaire, la deuxieme fois, on a commence a se poser des questions, quant aux fois suivantes…) et elle regorge aussi de temples bouddhites qui crachent fort une petite musique jouee par des xylophones a partir de 4h00 du matin (delicieuse la premiere fois, assomante les fois suivantes !…). On veut dormir !! Tu m etonnes qu ils font des siestes a longueur de journee dans leurs hamacs !!

Nous sommes maintenant a Kratie, au bord du Mekong et nous prevoyons de remonter le fleuve jusqu a Vientiane, la capitale du Laos. Un nouveau pays a decouvrir, poste-frontiere dans quatre jours… et zou !!

nous n avons pas beaucoup d argent, mais beaucoup d amour

… C est ce que nous a dit un bangladais qui consacrait une partie de son temps a aider les plus pauvres.
Dans les campagnes comme dans les villes, ce qui nous affole le plus, c est de voir des hommes tout maigres lestes de lourds fardeaux, peinant a la tache, le corps tendu au maximum, la sueur degoulinant sur le visage. A chaque jour sa peine, pour un salaire de misere, pour la survie. Il restera du Bangladesh quelques visages pour hanter nos pensees… Celui du conducteur de velo-rickshaw, un vieil homme au regard vide, hagard, extenue. Machinalement, il dit oui a tout, mais ses jambes ne tournent plus. Le visage d une femme completement decharnee. Elle dort sur le trottoir jour et nuit. Quand elle a un peu de force, elle implore du regard les passants pour avoir un peu d argent ou de nourriture… Silhouettes peuplant les trottoirs, les plus pauvres des pauvres, quel avenir pour leurs ribambelles d enfants ?
Mais pour tous ceux qui peuvent se le permettre, la generosite et l entraide sont des valeurs humaines capitales. Des que nous sommes arrives au Bangladesh, on nous a tres souvent invites a boire un the, des gens s arretaient sur la route : Do you need help ? What can I do for you ? Dans certains cafes internet, on ne nous a pas fait payer, because you are our ghests. Combien de mains a serrer, juste pour parler quelques minutes !!
Bon il faut quand meme preciser qu a chaque fois c est a Gael qu on s adresse. Puis invariablement arrive la question qui tue : Et elle, c est qui ? – C est ma femme. Et invariablement, enfin, les hommes se tournent vers Caro et daignent la regarder avec un immense sourire de soulagement… Pays musulman pour le meilleur et pour le pire…

Les touristes etrangers ne sont pas foule par ici et a chaque fois que nous nous arretons, cela cree de gros attroupements. Des dizaines de bangladais nous encerclent rapidement et nous regardent curieusement, guettant chacun de nos gestes pourtant ordinaires : manger des chips, peler une pomme, boire de l eau. Les pause-dejeuner peuvent parfois devenir oppressantes et peu reposantes, mais quelle seance cinema pour les locaux !

Le Bangladesh est un petit pays, mais la route evolue dans des regions tres differentes, meme si l eau reste toujours leur point commun, qu elle soit douce ou salee.
Dans certaines regions, nous sommes frappes par d immenses etendues d eau, inondant champs, cultures, poteaux electriques… Quand on sait que la saison des inondations a lieu aux mois de juin et juillet, cela a de quoi devenir effrayant. Des qu un bout de terre depasse de l eau, il est cultive. On voit hommes et betes aller aux champs, les chevilles enfoncees dans la boue. Suivant les endroits, une, deux ou trois recoltes de riz sont faisables par an.
La campagne est parsemee de tres nombreuses briqueteries et il n est pas rare d y voir les travailleurs se deplacer au pas de course, sous l oeil vigilant d un contremaitre. Parmi les ouvriers, tout comme pour les travaux des champs, on apercoit frequemment des enfants. Education et alphabetisation sacrifiees pour un salaire de plus dans la famille…

Aux alentours de Srimongal, on retrouve de nombreuses plantations de the et on en profite pour aller visiter une usine de transformation des feuilles en the. C est tres rapide, en moins de 24 heures, apres plusieurs phases de sechage. Mais les conditions de travail sont la encore assez precaires. Hommes et femmes d un certain age sont plies en deux ou accroupis a longueur de journee pour effectuer leurs taches.

A Chittagong, enfin, on revoit la mer : l ocean indien ! L horizon est rempli de cargos, bateaux de peche, petits ferrys, barques en tous genres. A la plage, il y a des chevaux, des quads, des petis bateaux, des vendeurs de boissons et de cartes postales… mais pas un chat a se baigner, a part un couple d amoureux : lui a garde son pantalon et T-shirt, elle son shalwar kameez (tenue traditionnelle portee par les femmes pour cacher leurs formes).
A quelques kilometres de la, une centaine de chantiers de demantelement de bateaux se cotoient. Tankers et cargos arrivent des mers et oceans les plus lointains : ils lancent les gaz une derniere fois pour venir s echouer dans la vase. En l espace de trois mois, ils seront mis en pieces par des hommes s activant non-stop jour et nuit : travail de forcat, travail de fourmi, pour s attaquer a ces molosses d acier.

La route continue pour aller aux confins de la Birmanie. Dans cette zone de collines, on croise des populations tribales : jeunes femmes portant des dessins blancs sur le visage, femmes plus agees fumant la pipe ou des cigarillos en allant aux champs. Sur les petites iles du lac Kaptai, on trouve quelques monasteres bouddhistes et des moines en train de jouer au cricket. Envie d arreter le temps, de se poser plus longtemps, ici…

La transition ne se fait pas d un coup, mais l arrivee a Dhaka est plutot brutale. Il y a trop de monde. Partout. Ca grouille, ca se bouscule, ca se cogne a tout prix pour passer. Dams la rue, c est chacun pour soi. Les chauffeurs de bus, tuk-tuk, rickshaws, voitures ne se laissent gratter d aucun centimetre et les pietons sont bien en galere pour traverser les rues dans ce chaos ambulant.
C est avec un pincement au coeur et deja de la nostalgie que nous quittons ce pays attachant et tous ceux qui nous ont accueillis, Radjiv, Russell, Mostafa, Jens et tant d autres.
Nous quittons Dhaka pour un vol vers le royaume de Siam. A l aeroport, la compagnie bangladaise ne nous fait pas payer nos 40 kilos supplementaires. Un peu apres, au bureau de l immigration, le douanier nous offre un gateau… Tout simplement incroyable, insolite… et plein d amour !!

Stairway to heaven

Khang-chen-dzon-ga : 8598 metres de haut, puissant, massif, la, devant nos yeux captives par ce somment… tout pres ou encore loin ? Nos reperes de distances se perdent dans le ciel.
Durant l espace de quelques jours, notre petite vie s articule autour de cette belle masse blanche : on se leve tres tot (3H30 – 4H00) pour aller voir le soleil se lever sur le sommet. A Darjeeling, on va boire un the dans le cafe `so british` dont les larges verandas permettent de prolonger le spectacle. APelling, on craque pour une grosse journee glandouille-lecture, installes confortablement en terrasse devant le sommet. Un dernier crochet en soiree, vers 17H00, pour voir le coucher de soleil sur la montagne. On a des tonnes de photos du Khangchendzonga !!

Entre Darjeeling et le Sikkim, la route zig-zague entre monts et collines. Des representations de la vierge Marie et de Jesus se nichent dans le creux d un virage. Quelques centaines de metres plus loin, les cloches du temple hindou carillonnent. Le matin, le muezzin appelle les musulmans a la priere. Et perches sur les bosses, de nombreux monasteres bouddhistes, tous aussi colores les uns que les autres, emaillent la region. Certains sont de veritables petits bijoux. Ils abritent de nombreux moines, et ce, des leur plus jeune age. Esprit de camaraderie, blagues et rigolades donnent beaucoup de vie et de joie a ces lieux pourtant remplis de spiritualite.

Dans ces contrees ou les montagnes crevent le ciel, il nous arrive parfois de maudire nos velos trop charges. Les routes du Sikkim sont souvent defoncees et les pentes tres raides. Un jour, alors que nombre de personnes nous avaient indique la route, nous nous sommes retrouves sur un chemin de gros cailloux, qui s est envahi petit a petit d herbes, pour tout simplement finir en grossier sentier de randonnee. Et nous, nous etions a pousser nos velos comme deux bourricots dans cette pente… Queslques heures plus tard, le temps de se sortir de ce bourbier, on a ete directement vers la station de jeeps !! Le Sikkim, c est pas fait pour le velo !!

En redescendant en altitude, la jungle fait place a de grandes etendues de plantations de the. Les feuilles du dessus forment un beau tapis vert tendre, c est magnifique. La saison de la recolte touche a sa fin, mais on voit encore regulierement des parcelles ou s activent des dizaines de cueilleuses. Certaines sont equippees d un tablier en plastique pour ne pas accrocher leurs robes, de gants et d un parapluie pour leur faire de l ombre. Sac sangle sur le front, concentrees sur leur travail, elles arrachent avec force et rapidite les feuilles de the. Activite tellement ordinaire pour elles et spectacle tellement fascinant pour nous ! Toutes ces feuilles sont ensuite sechees. Celles de meilleure qualite seront exportees. Les autres seront consommees par les locaux et additionnees de lait pour adoucir leur gout trop amer…

L Inde, geant asiatique au mille visages. Les Indiens du Nord-Est sont completement differents de ceux qu on avait croises dans le Nord-Ouest. Beaucoup plus chaleureux, ils nous lancent tres spontanement sourires et saluts… ca fait du bien ! Plus on avance vers l est, plus il devient difficile de s arreter, ne serait-ce que quelques minutes pour faire une photo ou boire un peu, sans qu un attroupement de dizaines de personnes nous encercle ! (Mais ils sortent d ou ?!!) Yeux eberlues, scotches sur notre equipement, ils nous prennent en photo avec leurs telephones portables. Un indien parlant anglais se detache du lot : ils vont enfin pouvoir comprendre qui on est et ce qu on fait la !!

Interview dun villageois indien a deux villageois francais :
- De quoi vivent les villageois, chez toi ?
- euh, ben, ils sont agriculteurs, ils ont des magasins ou alors ils vont travailler en ville…
- Quelles sont les principales cultures ?
- du mais, du ble
- vous n avez pas de riz ?!!
- ben non, il fait trop froid !
- Est-ce que la terre est de bonne qualite dans ton village ?
- euh…. vouais !
- Qu est-ce que vous avez comme animaux ?
- des vaches, des cochons, des poulets…
- Combien coute un kilo de pommes de terre en France ?
- 5 fois plus cher qu ici !!
- As-tu lu le livre de Mao ?
- ?!!!… euh… ben…. non !!
(il y a plein de petits drapeaux avec marteau et faucille qui decorent les rues du village ou on se trouve….)

Revigores par ces petites discussions marrantes, par les invitations a boire un the et par la route plate, on est tout sourires a pedaler toujours plus a l est. Les short-cuts des Indiens nous paument dans les petites toutes de campagne, pour notre plus grand plaisir ! La vegetation est de plus en plus dense, palmiers de toutes sortes, bananiers… Le bambou est roi : de nombreuses maisons sont en nattes de bambou, le linge colore seche sur de gros bambous, les mangeoires des animaux sont en bambou. La region deborde d eau : etangs, mares, feuilles de nenuphars et belles fleurs. La plupart des hommes, habilles en sarongs, sont equippes de filets et de gros pots pour stocker les poissons seches.
Et toute cette eau s ecoule tout soucement vers le Brahmapoutre, geant et majestueux, borde de sable blanc…
Et tout comme le fleuve, nous continuons notre route vers le Bangladesh et l ocean Indien… la mer dans une dizaine de jours, on a trop hate !!

no stress today nor tomorrow

Une brume epaisse recouvre la plaine du Terai au petit matin. Des silhouettes de bicyclettes chargees de marchandises apparaissent lentement et nous croisent avec d invariables grincements metalliques. Des femmes d une belle elegance portent une bassine brillante sur la tete et s en reviennent avec quelques kilos de terre humide pour colmater les trous de leur maison maintenant que la mousson est finie.
Les familles se reveillent doucement et sortent de leur abri en toit de chaume. La vie s installe dehors : etirements, brossage de dents. Nous nous faisons un malin plaisir a leur lancer de joyeux `Namaste !` alors qu ils ont la bouche encore pleine de dentifrice. Dans les villages ou les maisons sont en beton et qui connaissent le bonheur de la fee electricite, quelques postes de tele sont allumes des 6H00 le matin : ils proposent des programmes de gym douce sous fond bruyant de musique entetante.
A la meme heure, quelques dizaines de kilometres plus loin, dans la reserve naturelle de Bardia, la jungle se reveille. Les sifflements se multiplient, des papillons multicolores batifolent dans tous les sens. Une famille d elephants traverse la route sans faire de bruit.

Le jour se leve, la chaleur monte. La vie s etire au ralenti. Des zebus tirent des charettes au pas. Des vachers gardent leurs betes sous l ombre d un parapluie. Des paysans repetent les memes gestes depuis toujours et labourent le champ en dirigeant les buffles. Des petits groupes de femmes sont equipees d une faucille et vont pour couper de l herbe. Elles la ramenent dans des nacelles surchargees portees sur le dos et sanglees sur le front.
D autres ont la vie moins dure et sortent le carrom (billard indien) des 9H00. Des groupes de jeunes s agglutinent alors autour du plateau et se passionnent pour le jeu.

Apres la saison des pluies, de nombreux trous d eau sont encore plein : les enfants s equippent de cannes a peche de fortune et  s en reviennent en exhibant fierement leurs guirlandes de petits poissons.
Le soleil cogne dans l apres-midi. Dans les villages, les abris a l ombre sont tous occupes. Les conversations s animent, s etirent puis se fanent. Le temps semble s etre arrete. Seules quelques silhouettes se faufilent encore entre les rizieres.
Le soleil se couche tot en soiree, le linge multicolore eparpille sur le sol est ramasse. Les feux de bois sont allumes pour cuire riz et soupe de lentilles. Lampes et bougies s eteignent petit a petit pour laisser place a une nuit paisible.

Les kilometres defilent vite dans la plaine. Arrives a Butwal, notre route bifurque vers le nord et les montagnes qui bordent l Himalaya. Des femmes sont en pleine seance de meditation et relaxation face aux sommets. Nous on est en pleine preparation psychologique des centaines de metres de denivelle positif qui nous attendent les prochains jours !

Les paysages changent, la jungle se dresse a flanc de montagne, le camaieu des rizieres se dessine en terrasses, les bambous deviennent geants et servent de balancoires aux plus jeunes.
De nombreuses fontaines bordent la route. Apres y avoir fait leur toilette matinale et la lessive, les femmes ramenent de l eau a la maison dans de gros pots en laiton.
La route deroule virages et montagnes russes a profusion. Les joyeux `Bye, bye !` lances par les enfants caches derriere les bananiers nous font oublier l espace de quelques instants la sueur qui degouline sur le visage.
Enfin l horizon se degage sur les pics blancs de l Himalaya qui crevent majestueusement le ciel. C est haut. C est impressionnant. C est puissant.

La fete religieuse de Dossain se prepare pour les hindous. De nombreux buffles, chevres et poulets sont tues pour l occasion. La viande est etalee et depecee sur le bord de la route. Le sang et le cerveau des buffles sont offerts aux divinites hindoues. Hommes et femmes composent de jolis plateaux de fleurs et fruits et vont les porter dans de nombreux petits temples. Des grains de riz colores en rouge sont souvent colles sur leur front. Le bonheur et la joie d accomplir ce rituel se lisent sur leur visage.

L arrivee a velo dans le centre de Katmandou est d une belle intensite. Nous perdons  dabord notre chemin et nous retrouvons dans de toutes petites ruelles bordees de maisons centenaires, aux fenetres sculptees dans le bois. Des petits temples se dressent dans tous les coins de rue, des petits marches colores de fruits et legumes s installent sur fond de briques rouges. Et puis apres avoir demande notre route, nous debouchons en plein sur Durbar square, un ensemble de temples d une grande beaute. Cela nous coupe le souffle et promet de belles journees dans la capitale !

un abecedaire pour 2 semaines indiennes

A. Attari-Wagah border : c est la seule frontiere entre l Inde et le Pakistan et elle est deserte. Les personnes qui la traversent se comptent sur les doigts d une main chaque jour.

B. Bidonvilles, bidonvillages : la misere et la pauvrete sont partout sur le bord des routes, meme a la campagne. Dans des tentes bricolees d herbes et de plastiques s entassent hommes, femmes et ribambelles d enfants.

C. C est cool de pedaler dans la plaine, ca repose les jambes !

D. Debauche de couleurs plus vives et eclatantes les unes que les autres : femmes drapees de saris et turbans des sikhs qui n en sont pas peu fiers !

E. Envie de calme ! Qu on soit en ville ou sur la route en campagne, le bruit est incessant !

F. Fleurs oranges, blanches, roses posees dans de petites corbeilles fabriquees avec des feuilles de bananier. Agrementees de batonnets d encens ou de bougies, ces offrandes accompagnent 1000 voeux dans les meandres des voies sacrees de l hindouisme !

G. Gange : il emerge de l Himalaya a Haridwar, ville sainte. Spectacle saisissant et magique : des centaines de personnes viennent y faire leurs ablutions, leurs prieres, se baignent, s eclaboussent, s amusent et jouent. Il y a beaucoup de joie et de recueillement. C est fascinant !

H. Haut-parleurs : installes sur les toits des temples hindous, des gurdwaras (temples sikhs), des mosquees et meme des eglises. Qui c est qui preche la bonne parole le plus fort ?

I. Indiens : 1 milliard, et moi, et moi, et moi ?!

J. `Jey ! Jey ! Jey !` scande face au Gange, ce slogan signifie tout le respect que les hindous ont pour le fleuve.

K. Klaxons : bruyants, melodieux, stridents, soudains, repetes, ils sont incessants sur n importe quelle route. Quand un bus lance a toute vitesse klaxonne, ca veut dire `Pousse-toi, j arrive, et j ai pas envie de freiner !`. Deux options : soit il a la place pour te doubler, soit tu plonges sur le bas-cote…

L. Libertad va beaucoup mieux ! Les rayons tiennent bon et les crevaisons a repetition sont du passe !

M. Musique a plein volume, sacree pour les ceremonies hindoues, ou alors bien rythmee s echappant des baffles des tracteurs ! Y`a de l ambiance !

N. Nans : pains plats encore chauds au beurre, a l ail, aux oignons, aux legumes, au fromage, a la coriandre… Mmmmh….Mmmmh….Mmmmh !

O. Odeurs qui s entrechoquent, des delicieuses vapeurs d encens au petit matin aux relents immondes des ordures ou carcasses d animaux sur le bord des routes.

P. Paneer* nan, c est celui-la que je prefere !…Mmmmh !!
* fromage

Q. Qu est-ce qui est orange, a point rouge sur le bord d une route ?
Un saddhou* qui fait du stop !
* pelerin hindou qui est cense mediter et qui vit de l aumone des gens.

R. Regime de bananes : on en ingurgite une douzaine a deux tous les jours !

S. Singes : ce sont des colonies qui jalonnent le bord des routes en certains endroits. Loin d etre peureux, ils se montrent parfois agressifs et nous ont meme pique un sac plastique sur le porte-bagages. Ca nous a coupe toute envie de camper. Du coup c est grand luxe en Inde, hotel-resto tous les soirs !

U. Utopique ? Une Inde sans mendiants, sans estropies sur planche a roulettes, sans cabane terreuse et misereuse, avec des enfants ayant tous l obligation d aller a l ecole ?

V. Vert tendre des rizieres sur des centaines de kilometres. La couleur est lumineuse et eclatante, c est beau, on ne s en lasse pas !

W. Whisky, l English wine, vendu dans de nombreux magasins. On a passe une soiree avec un papi sikh qui s en servait discretement de bonnes doses. Euh, le but des sikhs n est pas de mener une vie pure ? Sans tabac ni alcool ?!!

X. Encore un croisement qui n est pas indique sur notre carte plutot nulle. On est sans arret a demander notre route ! Les indiens nous indiquent tous leurs short cuts (raccourcis) et forcement ne sont pas toujours d accord entre eux ! Bon alors, on prend a gauche ou a droite ? On tire a pile ou face ?!

Y. Yamuna : le fleuve deborde et a depasse sa cote d alerte. Mi-septembre, la mousson n est toujours pas terminee. On s est pris quelques paquets de flotte sur la tronche !

Z. Zou ! En route vers le Nepal ! On a un mois pour decouvrir le pays et 1300 kilometres a parcourir !

IN PAKISTAN WE TRUST

Le slogan revient toujours, placarde en banderolles pare-soleil sur les bus et les mini-bus : `In God we trust`, `In Allah we trust`. Mais tout autant qu ils croient en Dieu, nous on croit en leur gentillesse, leur generosite, leur accueil, leur curiosite, leur volonte de s eduquer, de se developper et surtout de montrer au monde ce qu ils ne sont pas : de cruels et barbares terroristes.
Les pakistanais sont furieux contre les medias qui leur ont vole leur ame et ils ont raison. Durant ces quelques semaines, a aucun moment nous ne nous sommes sentis en insecurite. Bien au contraire, chaque jour a apporte son lot de pakistanais qui nous offraient des boissons fraiches, qui nous invitaient chez eux, qui nous guidaient ou alors qui circulaient au coude a coude en petite moto pour taper la discut.
Bon OK, on a bien croise quelques allumes a la barbe touffue et au regard passionne qui faisaient de longs discours enflammes en ourdou, exclusivement pour Gael, et ignorant superbement Caro. Les traductions etaient toutes les memes : il n y a qu un seul Dieu, qui a cree Adam et Eve, et qui a drolement bien fait son boulot. Le Darwinisme ? Connais pas ! Et ca dure, et ca dure… Le discours se conclut invariablement par un `Do you agree with me ?` Que repondre d autre que `Yes, of course !` Alors tout content, l allume s en va pour revenir plus tard charge de boisson, fruits, gateaux. Gael a meme eu le droit a une petite bouteille de parfum !

C est sur que quand on se trouve au Pakistan en plein Ramadan, la religion prend toute la place dans le quotidien. Le soleil se leve tot et se couche tard en ete, avec interdiction de manger entre les deux. Il fait chaud, et meme tres chaud dans certaines zones, les musulmans n ont meme pas le droit de boire de l eau… Il faut les voir, le soir, en attendant l appel du muezzin, comment ils pelent et coupent soigneusement en morceaux leurs pommes et bananes, les disposent dans la corbeille, se versent de l eau dans un verre, quelques dattes dans un bol, le paquet de cigarettes a portee de main. 5, 4, 3, 2, 1… Les haut-parleurs de la mosquee crachottent un chant melodieux, c est la delivrance, go !!

Mais pour deux cyclos qui pedalent dans le pays pendant cette periode particuliere, cela signifie qu il est impossible de trouver du pain avant 18H00, ni de rencontrer un cafe ouvert tant qu il fait jour ! On se fait aussi discrets que possible quand on se prend un encas ou qu on pique-nique sur la route.

De Gilgit a Islamabad, la KKH continue son chemin a flanc de montagnes puis de collines. Au nord de la vallee Kaghan, les paysages sont de type alpins, on se croirait arrives en Suisse, mais voila que deboulent trois gars au regard clair et a la barbe noire, drapes d une couverture et coiffes d un chapeau a la Massoud. Les femmes aux robes de couleurs eclatantes lavent linge et vaisselle dans les ruisseaux. Les familles vivent dans des cabanes sombres et terreuses. Les buffles paissent paisiblement. Les enfant accourent a notre arrivee et nous regardent passer avec de grands yeux etonnes… On n a pas vu d ecole dans cette region.
La piste voit passer caravanes d anes charges et camions ultra-decores. Cette piste qui continue a nous rincer : passages sablonneux, trous, cailloux, gues a traverser, gadoue ou la seule solution pour avancer est de mettre les deux pieds dedans. La fatigue se fait sentir pour les velos aussi : 5 rayons de casses en 2 jours, piece qui tient le porte-bagage cassee et a ressouder, crevaisons, patins de freins uses en un rien de temps… Pouf ! Ca se merite ! In Asphalt we trust ! Asphalt power !! Forcement quand le goudron fait sa reapparition, c est du bonheur, on avance beaucoup mieux, meme si les montagnes russes continuent !

A Islamabad, nous retrouvons de nouveau notre copain Asif. C est genial car on peut discuter de tout avec lui. Tres croyant et passionne par le journalisme, il a plusieurs combats : denoncer la corruption des institutions du pays, temoigner du rejet des talibans par une ecrasante majorite de la population et promouvoir l education pour tous : filles comme garcons.

C est avec un petit pincement au coeur que nous filons sur les dernieres kilometres au Paki. D Islamabad a Lahore on est dans la plaine, le climat est chaud et humide. Paysages de rizierse et buffles pataugeant dans des mares de boue. La route est tres encombree et les passages dans les grandes villes sont plutot sport. Il faut jongler et slalomer entre les bus, camions, voitures, motos, velos, rickshaws, charettes tirees par anes et chevaux, pietons, plus tous ceux qui arrivent en contre-sens, plus tous ceux qui s arretent brusquement ou qui ralentissent pour nous regarder passer, plus tous ceux qui se collent pour pouvoir discuter… vous imaginez le tableau ?!! A cela il faut ajouter le bruit petaradant de certains vehivules, les klaxons incessants, la cacophonie des mosquees, la fumee, la poussiere, les images qui defilent a 100 a l heure ! Stop ! Besoin de reprendre le souffle et de digerer !
La route qui relie le Pakistan a l Inde est justement deserte, avec un traffic quasi-nul. Quand est-ce que ces deux pays qui jadis n en faisaient qu un vont se reconcilier ?
L arrivee en Inde, a Amritsar, est d une paisibilite bien agreable : calme, beaucoup de velos, vert tendre des rizieres. Les hommes, des sikhs, aux turbans tous plus colores les uns que les autres nous montrent leurs plus beaux sourires derriere leurs barbes et leurs moustaches bien entretenues…
La route continue est direction de Chandigarh, puis du Nepal !

PS : on a charge quelques photos en plus…

ENFIN QUELQUES PHOTOS !!

Dans la rubrique photos…
C est tellement long a charger qu il n y en a pas beaucoup… On verra si ca va plus vite en Inde ou au Nepal !
A plus !

J`irai au bout de mes reves

La Karakoram highway. The KKH. Un vieux reve a realiser. Une route a la reputation legendaire chez les cyclos, une des plus belles au monde. A cheval sur la Chine et le Pakistan, de Kashgar a Islamabad, elle tutoie le ciel et trace son chemin entre une dizaine de sommets au-dessus de 7000 m : le Khongur Shan a 7719 m, le Muztagata a 7546 m, le Nanga Parbat a 8126 m… Des paysages a couper le souffle, montagnes verticales demesurement hautes, des dizaines de kilometres de gorges etroites et sinueuses, la surprise d un petit village avec arbres, fleurs et cultures qui se niche au creux d un virage, de nouveau des dizaines de kilometres de gorges, de nombreux troupeaux de moutons, chevres, chevaux, quelques chameaux et quelques yaks, les uns et les autres parfois montes, de massives dunes de sable qui cotoient les montagnes enneigees a 3400 m d altitude.
Et puis il y a toutes ces femmes aux couleurs vives et chaudes qui travaillent dans les champs. Beaucoup sont d origine tadjike, elles portent un chapeau carre brode et tres colore. Elles ont le regard clair et lumineux. L herbe coupee est nouee en petites bottes, le bois est transporte dans des nacelles sur le dos. Les abricots sont mis a secher sur les toits. Cote pakistanais, les sourires s elargissent, invariablement accompagnes d un `How are you ?`. C est un vrai plaisir de s arreter discuter avec eux, ce sont des instants plein de chaleur qui donnent bien la peche ! Les vacances sont terminees, enfants et ados en uniforme vont a l ecole, certains parcourent a pied jusqu a 10 km aller-retour. Les manuels que nous avons feuilletes etaient tous en anglais, que ce soit des travaux de coloriage-decoupage pour les plus petits aux notions plutot pointues de physique et de chimie pour les plus grands !
Voila donc cette KKH qui nous en met plein la vue et le soir venu nous empeche de dormir : le spectacle est trop beau, les images continuent a defiler dans la tete.
Et pourtant c est une route qui vous rince, qui vous vide physiquement, on y laisse des plumes, surtout en cet ete 2010. Les fortes precipitations qui ont eu lieu il y a 3-4 semaines ont provoque de tres nombreux eboulements de terrain. De nombreuses regions ont ete coupees du monde pendant 2 a 3 semaines, l electricite se fait toujours rare, de meme que l essence et le gaz (un litre d essence vaut 2,5 € !).
Cote chinois, un pont long de 200 m s est effondre et il a fallu attendre quelques jours pour qu une piste le contournant soit tracee. Cote pakistanais, l asphalte n est plus qu un doux souvenir. La route est completement detruite, la piste n est que cailloux et sable. De nombreux petits chantiers jalonnent la route. On a du mal a croire qu elle a ete jadis entierement asphaltee. On avance lentement. Il a plu pendant deux jours, on est bon pour rouler dans la gadoue. Un pont est casse, une tyrolienne a ete installee : on passe dans une petite nacelle au-dessus de la riviere grise et bouillonnante. Suite a un gros glissement de terrain debut janvier, un lac long d une trentaine de kilometres et profond de 150 m a inonde cultures et habitations : la KKH est coupee, il faut prendre un bateau.
Les conditions de vie sont difficiles dans cette region. Les gens en ont assez et sont furieux contre leur gouvernement qui ne fait que des promesses…
Nous sommes actuellement a Gilgit, a 430 kilometres d Islamabad. La KKH est coupee apres Chilas et nous devons donc prendre une route secondaire, par la Kaghan valley et le Babusar pass a 4170 m. Tous les gens qui ont pris cette route nous disent `It is awful`, `It is horrible`, `Very difficult`, `Very bumpy, very steep`… Bon ben, on va y aller doucement mais surement !! En attendant nous avons ici retrouve notre ami Asif et il nous a concocte tout un programme : il a prevu de nous emmener dans sa famille, dans le village de son enfance, d aller camper dans une petite vallee paradisiaque, de nous expliquer pourquoi le ramadan est si important pour les musulmans… a suivre dans le prochain episode !